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Faut-il renoncer à la justice pour pardonner?

  • Morinehtar
  • 6 août 2023
  • 6 min de lecture

I) Dans notre relation avec Dieu dans le cadre du plan de salut


En ce qui concerne le pardon de nos péchés et la justice divine, c'est "simple": un Médiateur a pris sur lui le prix de nos péchés et nous épargne d'en subir les conséquences sous réserve que nous nous repentions, nous permettant ainsi_encore une fois, sous réserve de repentir_de retourner vivre dans la présence de Dieu.


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Les conséquences du péché dont l'Expiation de Jésus-Christ nous libère incluent notamment le fait d'être séparé de la présence de Dieu, l'arrêt de notre progression, la perte de discernement de la lumière du Christ. Parce que le but de Dieu est de "réaliser l'immortalité et la vie éternelle" de ses enfants, et que tel est l'objet du plan de rédemption (dont le pardon permis par le sacrifice du Fils de Dieu est la pièce centrale), Dieu nous accorde le pardon dans le but de nous permettre de surmonter le péché par la foi en son Fils.

D'abord, et c'est important, notre jugement est remis à plus tard: ceux qui ne se repentent pas seront condamnés, mais seulement après qu'un temps de probation leur ait permis de choisir de se repentir ou non, de saisir l'occasion donnée par un Dieu aimant de bénéficier pleinement de leur héritage d'enfants divins ou de le rejeter. Ainsi, il nous est possible de nous repentir, de progresser, de retrouver la clarté après nous en être détournés, tout au long de notre état probatoire et ce malgré notre état déchu. En effet, on voit que même sans connaître celui qui exerce la miséricorde à leur égard, tous les hommes sont capables d'apprendre de leurs erreurs et de progresser au cours de cette vie. Ce ne serait pas possible sans le sacrifice de Jésus-Christ.

Ensuite, en exerçant notre foi et en nous repentant par l'obéissance aux commandements, résolution dont nous témoignons par le baptême, c'est-à-dire alors que nous choisissons de suivre le Christ, le Sauveur, le Rédempteur, nous recevons par alliance les promesses du pardon et du don du Saint-Esprit, étant ainsi purifiés, et justifiés par la grâce de Jésus-Christ. Bien sûr, ces promesses s'accompliront pleinement à la fin de notre état de probation, quand notre Avocat auprès du Père plaidera pour nous à la barre du jugement. C'est ainsi qu'il nous faut persévérer jusqu'à la fin pour perfectionner et cristalliser notre repentir, et montrer au Père que nos intentions sont réelles quelles que soient nos circonstances ici-bas.


II) Dans nos relations avec nos semblables


Je suis persuadé que nous avons un sens plus ou moins inné de la justice: un jeune enfant reconnait et ressent une situation injuste. Est-ce un effet de la lumière du Christ? Peut-être. Ce que je veux dire, c'est que je crois qu'une des choses que nous sommes venus apprendre sur terre, c'est la miséricorde. En la recevant et en la donnant.

Je crois que fondamentalement, on n'aime pas et on ne veut pas pardonner parce qu'on refuse l'injustice de devoir assumer les conséquences de choix qui ne sont pas les nôtres. Car le pardon va bien au-delà de l'offense ou de la vexation auxquelles il est souvent associé. Le pardon est l'expression la plus pure et la plus noble de la charité, qui est patiente, et pleine de bonté. On est naturellement plus tolérant envers ceux que l'on aime. Un parent assume la réparation d'un tort causé par son enfant dans la mesure où l'enfant n'en est pas capable. Il est beaucoup plus difficile d'accepter de subir les conséquences des choix de ceux dont on pense qu'ils pourraient mieux faire. Le même parent sera plus réticent à payer une amende reçue par un enfant adulte ayant commis une erreur. Un mari supportera mal d'arriver en retard à un rendez-vous parce que sa femme aura passé une heure à faire sa toilette. Un associé blâmera son collaborateur de la perte d'un client s'il s'est montré négligent.


Le terme "patience" vient du latin "patior" qui signifie: "je souffre". Faire preuve de patience, c'est quelque part accepter de souffrir.


Et le monde, à cause de son iniquité, le jugera comme n’étant que néant ; c’est pourquoi, ils le flagellent, et il le souffre ; et ils le frappent, et il le souffre. Oui, ils crachent sur lui, et il le souffre, à cause de sa bonté aimante et de sa longanimité envers les enfants des hommes. (1 Néphi 19:9)

Pour autant il ne faut pas penser que pardonner signifie embrasser ou s'abandonner à l'injustice, et encore moins à la méchanceté. Cette confusion est à l'origine de bien des malentendus sur la notion de tolérance_qui est une extension du pardon: c'est un pardon d'attitude, proactif.


Dans sa première édition, Prêchez mon Evangile définissait ainsi la patience:


La patience est la capacité d’endurer les retards, les ennuis, l’opposition ou la souffrance sans se mettre en colère, sans être contrarié ni anxieux. C’est la capacité de faire la volonté de Dieu et d’accepter que les choses se fassent au moment qu’il a choisi. Lorsque vous êtes patient, vous supportez les pressions et vous êtes capable d’affronter l’adversité dans le calme et l’espérance. La patience est apparentée à l’espérance et à la foi : il faut attendre que les bénédictions que le Seigneur a promises s’accomplissent.
Vous avez besoin de patience dans votre expérience et vos relations quotidiennes, surtout avec votre collègue. Vous devez être patient avec tout le monde, notamment avec vous-même tandis que vous travaillez à surmonter vos défauts et vos faiblesses.

Dans l'Évangile de Jésus-Christ, et c'est là qu'on relie notre relation avec les autres avec notre relation avec Dieu, le pardon a un objectif: celui de permettre la rédemption. Pardonner à notre prochain, c'est exprimer notre foi dans le pouvoir du Christ de le transformer en sa version optimale. Pardonner, c'est inviter au repentir et en cela, ce n'est absolument pas renoncer à l'injustice, bien au contraire! Pardonner à la manière du Sauveur, c'est croire au potentiel des enfants de Dieu de devenir justes. Bien entendu, certaines personnes ne répondront pas à cette invitation. Mais les promesses qui sont l'objet de notre foi incluent justement le fait que par la grâce du Christ toutes les injustices seront réparées, toutes les larmes seront séchées. Ainsi, nous n'acceptons pas la souffrance par masochisme, mais dans l'espérance de la loi de la restauration (Alma 41:13-15). En pardonnant, nous choisissons une justice plus parfaite, et nous devenons nous-mêmes plus divins en élargissant notre perspective sur la vie, sur Dieu et son plan, sur le monde dans lequel nous vivons.

Dans l'édition 2023 de Prêchez mon Évangile, la définition de la patience a ainsi été précisée:

La patience est la capacité de faire confiance à Dieu lorsque l’on est confronté à l’attente, à l’opposition ou à la souffrance. Cela signifie que, par la foi, vous faites confiance au calendrier de Dieu en ce qui concerne l’accomplissement des bénédictions promises.
Lorsque vous êtes patient, vous voyez les choses avec une perspective éternelle. Vous n’attendez pas de bénédictions ou de résultats immédiats. Vos justes désirs seront souvent réalisés « ligne sur ligne, précepte sur précepte, un peu ici et un peu là » (2 Néphi 28:30). Parfois, certains désirs justes ne se réalisent qu’après cette vie.
La patience n’est pas l’oisiveté ou la résignation passive. C’est « [faire] de bon gré tout ce qui est en [votre] pouvoir » tandis que vous servez Dieu (Doctrine et Alliances 123:17). Vous plantez, arrosez et nourrissez la semence, et Dieu la fait croître au fur et à mesure (Alma 32:42 ; voir aussi 1 Corinthiens 3:6-8). Vous travaillez en partenariat avec Dieu, ayant confiance que lorsque vous aurez fait votre part, il accomplira son œuvre en son temps, dans le respect du libre arbitre de chacun.
Être patient signifie également que lorsque quelque chose ne peut pas être changé, vous finissez par l’accepter avec courage, grâce et foi.
Développez la patience envers autrui, y compris envers votre collègue et les personnes que vous servez. Soyez aussi patient avec vous-même. Efforcez-vous d’être la meilleure version de vous-même tout en étant conscient que vous évoluerez pas à pas.
Comme pour les autres vertus chrétiennes, l’acquisition de la patience est un processus qui dure toute la vie. L’exercice de la patience aura un pouvoir guérisseur sur votre âme et sur les personnes qui vous entourent.

Pour finir, un rappel quand même sur le fait que le pardon ne veut pas dire se transformer en paillasson, mais ne pas conserver de haine ou de rancune, tout en se protégeant si nécessaire. Nous avons des sensibilités différentes, la nature et la portée des offenses varie énormément, mais dans la mesure du possible, avec à l'esprit la progression et le repentir du transgresseur, à son niveau et selon ce qui est approprié, le deuxième mille pourrait être d'aider le transgresseur à effacer son ardoise, de même que le Christ nous aide à nous repentir par sa grâce et par les dons de l'Esprit.


 
 
 

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